Normandie : terre-de-nos-mères

Normandie : terre-de-nos-mères

L'accident de l'oncle "Polyte"

L'accident de l'oncle « Polyte »

 

 

Le mari de mon arrière grand-tante Marie Bonnegent, Hippolyte Hubert, cultivateur-éleveur à Notre Dame d'Epine, a eu un accident de la route sur la D 43 au carrefour de Marlebrough.

Cet endroit est toujours très dangereux, il traverse la « route de Paris », comme on l'appelait dans ma jeunesse, route qui conduit à Deauville Trouville. Or, des paysans doivent la traverser avec des tracteurs, des tombereaux ou de vieilles voitures poussives, pour aller à Bernay au marché ou rentrer leurs récoltes des champs situés de part et d'autre de cette artère principale permettant aux Parisiens nantis et donc pourvus de voitures rapides de rejoindre leur lieu de vacance.

 

Les seuls papiers que nous ayons datent du 5 Décembre 1935, verdict du Tribunal Correctionnel de Bernay, qui, en appel, confirme une condamnation de 72.135 francs à verser pour dédommager les victimes. Il y eu deux morts lors de ce drame : une mère et son enfant ; le père survit et engage la procédure.

 

D'après la tradition familiale, l'oncle revenait soit d'une foire soit d'une partie de chasse et, en tout cas, l'une ou l'autre occasion aurait été largement « arrosée » ; bref, il n'a pas vu la voiture arriver et s'est engagé ; l'autre voiture roulait-elle trop vite ? Nous sommes dans les années 30! les « bolides » à cette époque ne devaient pas dépasser 100 km/h...

 

Comment faire pour trouver un récit réaliste ?(j'ai tendance à me méfier des récits de la famille, leur ayant « tordu le cou » plusieurs fois) Très simple ! Aller aux AD et retrouver les 2 procès (il y a eu appel) en série U : un jeu d'enfant... sauf que les AD sont à 800 km !!

Pas facile.

Alors trouver un récit dans la presse : 2 morts font au moins une « brève », je sais c'est horriblement dit mais vrai...

Trouvons un journal de l'Eure en ligne pour les années 1930. Bernique ! Même après avoir épluché les sites indiqués dans « la presse ancienne » (RFG 228), pas un seul ne concerne l'Eure ! Normannia ne concerne que la Basse Normandie et sur Gallica, pas grand-chose à glaner au moins en 1930

En désespoir de cause, voyons chez les « voisins » et sur le site des AD 76 , le «Journal de Rouen » !

 

 

 

Première exploration qui confirme son sous-titre de « Journal de Normandie », il donne bien des informations sur les départements voisins, succints certes, mais présents et en particulier des faits divers. Alors, « faute de grives »...dépouillons « le merle » !

 

Nous avons aussi un autre document : une lettre terrible du survivant de l'accident dans lequel il a perdu son épouse et son fils, or elle est datée du 16 Novembre 1933 et reproche à l'oncle de ne pas régler le montant des dommages :

 

« Monsieur,

Vous, qui par votre faute avez causé la mort d'une jeune femme et de son enfant, vous vous retirez ostensiblement à régler les dommages ou partie des dommages qui vous ont été imposés par le juge. »

 

L'accident a donc eu lieu avant Novembre 1933

Armons-nous de patience et explorons les journaux à rebours.

 

Après quelques centaines de pages dépouillées, toujours pas trace de l'oncle ! Serait-il possible que l'accident ait eu lieu 3 ans avant la lettre ? Je commençais à désespérer mais mon côté « Pitbull » ne voulant pas rester sur un échec, pris le dessus et j'attaquais l'année 1930 à l'envers : Décembre, Novembre, Octobre ; rien ! Et voici le 22 Septembre enfin ! Le récit de l'accident :

22-9-1930 accident oncle 1

 

22-9-1930 accident oncle 2

 

Rien n'indique que l'oncle ait été éméché (encore une légende familiale à oublier ?) et la dangerosité de ce carrefour due à une mauvaise visibilité semble être seule en cause.

Pourtant, l'oncle fut condamné et dut vendre tous ses biens pour régler les dommages 

 

Reste à retrouver le procès en correctionnel au Tribunal de Bernay (5 Novembre 1931 et 31 Mai 1932) et le procès en appel en 1935 à Rouen, pour éclaircir les faits qui sont reprochés à l'oncle. A noter que le conducteur de l'autre véhicule ne semble pas s'être impliqué dans cette procédure.

 

Au cours du dépouillement du journal, nous avons retrouvé un autre accident au même carrefour et où le drame a été évité de justesse ; l'intérêt c'est que le récit est fait par un gendarme qui a failli y laisser la vie le 3 Septembre 1931...

 

 

 

 



17/10/2022
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 4 autres membres